In my first video tea class of the semester, I talked briefly about the concept of antifragility. Nassim Taleb has popularized this idea that sometimes the strongest organisms or organizations can also be very fragile, because a 'black swan' event (something unexpected) can derail them and this can sometimes even be fatal. The best example to explain this idea are dinosaurs. They once were the most powerful and largest animals on the planet, but they disappeared when a meteor hit earth and caused a sudden climate change. Smaller animals and insects were better able to adapt and managed to survive. We also see this in companies when there's a technological change (candle makers, horse carriages, Kodak...) or even governments when they become bankrupt (Louis XVI, Weimar, the Soviet Union...) Fragility is also being dependent on others for essential products. There are two ways to reduce fragility: shoring the production of these products back to your country or building stronger ties (military, diplomatic and/or financial) with the foreign producers to make sure that they won't stop producing and selling to you. So, we can see that this concept of antifragility is at the core of the this year's diplomacy. It's all about reshoring manufacturing, energy and rare earth independence...
In tea, we also encounter the concept of antifragility. First, the tea itself can be good or bad, but also fragile or antifragile. A fragile tea is a tea that can easily become bad. Good tea can become either bad during storage or during brewing. Storage problems are quite common in the tea world. This summer, this topic came up in most of the video chats with several tea customers who had placed a large order on tea-masters.com. Andrew, in the US, had trouble aging his raw puerh well, despite living in a rather humid area (DC). He didn't want to age young puerh anymore, preferring to purchase aged puerh from Taiwan or Asia, even if this meant paying more for this service. Indeed, with almost any tea it's quite a challenge to age it well. Green teas are the most fragile, I'd say, because their quality relies so much on their freshness. Well aged green teas can still taste great, but their aromas will have changed radically and might not be what people expected.
Fresh high mountain Oolong teas are less fragile than green tea, but they are also subject to change after opening the vacuum sealed bag.
The least fragile teas for aging are shu puerh and very heavily roasted Oolongs. However, these teas are usually very unidimensional and rarely the favorites of tea drinkers.
Roasted Oolongs provide a good compromise between antifragility to aging and freshness/quality. Actually, well roasted Oolongs feel rounder, more harmonious and are able to keep their original fresh aromas. And instead of experiencing aging as a downhill process, well preserved roasted Oolongs can improve with time. This is a truly antifragile characteristic: it behaves against the general trend.
This is the case with this Oriental Beauty Tradition. Like all my Oriental Beauty Oolongs, it has been carefully roasted in order reduce the moisture in the leaves. This makes them not just more stable, but also opens up the aging potential. That's why I particularly enjoy Oriental Beauty Oolong that is one year old or more. But, while I can get excellent results with 40 years old Dong Ding, the potential of OB is a more limited, because the leaves are close to fully oxidized. The OB from 2000 I have in my collection shows that around 20 years of age, the improvement hits a wall.
Earlier, I mentioned another fragility: being unable to unleash the good aromas of good tea during the brewing. Against this fragility we learn the skill of brewing tea. This is what has motivated to take tea classes for over 20 years and why I want to share my skills with you. Because I witnessed myself how purchasing good tea, a cute teapot and small porcelain cups wasn't enough to obtain a good cup. Of course, a good tea is usually often forgiving of mistakes, but if you really want to make it shine, then you need to pay attention to all the details.
Au Bonheur des Dames est le roman des grands magasins, mais aussi un roman à l'eau de rose d'Emile Zola. En effet, il a tout de La Belle Denise et de la Bête Mouret avec une jeune, jolie et gentille fille dont tombe follement amoureux le riche entrepreneur. Mais celle-ci ne se laissera conquérir qu'au prix d'une transformation en profondeur de cet homme qui collectionnait les femmes et les conquérait comme autant de trophées ou de pièces de gibier.
Mais ce qui nous intéresse, c'est de voir la signification des boissons dans ce roman. La première constatation est que ce roman est plutôt sobre. Il n'y a que 22 mentions de boissons alcoolisées pour 43 boissons sans alcool et 6 boissons métaphoriques, soit 71 mentions en tout. Comme souvent, le café est en tête avec 18 mentions, mais le thé suit de près avec 16 mentions et le vin avec 14 mentions. Ensuite, nous avons le lait et l'eau avec 4 mentions chacun, le champagne 3, le bock 2, la bière 1, le sirop 1, le malaga 1 et les liqueurs 1. Les 6 métaphores sont, comme d'habitude, les plus parlantes et les plus proches du sujet du roman. Ainsi, comme boisson métaphorique nous avons le magasin, lui-même (Bourras, un vieux boutiquier), sa vie, les passants, l'argent et un ruissellement. Nous reviendrons plus en détail sur ces six 'boissons' imagées.
Passons d'abord aux 16 mentions de notre boisson favorite.
Chapitre III. "Chaque samedi, de quatre à six, Mme Desforges offrait une tasse de thé et des gâteaux aux personnes de son intimité, qui voulaient bien la venir voir."
Commentaire: Mme Desforges fait donc partie de la haute société, car c'est là que le thé est un prétexte pour réunir des amis autour de soi, toujours le même jour et à la même heure. On y buvait surtout du thé rouge, aux feuilles entièrement oxydées, car c'est ce qui se marie le mieux avec les gâteaux.
"Cependant, les mains toujours liées, ils passèrent en plaisantant dans le petit salon, au moment où le domestique apportait le thé, un service de Chine, sur un plateau d'argent, qu'il posa près de Mme Desforges, au milieu du guéridon de marbre, à légère galerie de cuivre.
(...)
Sa voix s'était échauffée ; Henriette, qui servait le thé, avait tourné la tête.
(...)
Voulez-vous une tasse de thé, monsieur de Callagnosc?
(...)
Et elles l'entouraient, lorsque Henriette remarqua qu'il n'avait seulement pas pris une tasse de thé. Alors, ce fut une désolation ; quatre d'entre elles se mirent à le servir, mais à la condition qu'il répondrait ensuite. Henriette versait, Mm Marty tenait la tasse, pendant que Mme de Boves et Mme Bourdelais se disputaient l'honneur de le sucrer. Puis, quand il eut refusé de s'asseoir, et qu'il commença à boire son thé lentement, debout au milieu d'elles, toutes se rapprochèrent, l'emprisonnèrent du cercle étroit de leurs jupes.
(...)
Il continuait à boire, entre chaque phrase, une petite gorgée de thé, dont le parfum attiédissait ces odeurs plus âpres, où il y avait une pointe de fauve.
(...)
Une dernière clarté luisait au flanc de la théière, une lueur courte et vive de veilleuse, qui aurait brûlé dans une alcôve attiédie par le parfum du thé."
Commentaire: Le luxe du thé d'Henriette Desforges est souligné par le fait que son service provient de Chine et qu'elle utilise un plateau en argent pour le servir. Remarquons que si un domestique apporte le thé, c'est la maitresse de maison qui, elle-même, en verse à ses invités. Cela donne lieu à une scène bouffonne où 4 femmes essaient de se rendre utile à l'homme le plus en vue du salon. Celui-ci capte l'attention et joue des silences qu'il s'impose en prenant une gorgée de thé entre chaque phrase. Ainsi, le thé est au centre de ces réunions mondaines du Paris de la fin du XIXe siècle.
Chapitre V.
"Il se fâcha quand Denise parla de régler, puis finit par accepter les quinze francs soixante, qu'elle avait posés sur la commode ; mais il voulut lui offrir une tasse de thé, et il se batit contre une bouilloire à esprit-de-vin, fut obligé de redescendre acheter du sucre."
Commentaire: Denise, Pauline et son petit ami ont passé le dimanche ensemble, à la campagne. Ces employés de magasin ont des revenus faibles et Denise, la plus pauvre, doit insister pour payer sa part. Le thé qu'on veut lui offrir doit être très amer (donc de mauvaise qualité) pour qu'il faille aller acheter du sucre pour pouvoir le boire.
Chapitre VI
"Soyez aimable, venez ce soir tremper une tartine dans une tasse de thé."
Commentaire: Mouret invite Denise à diner et elle refuse, car ces diners avec des employées sont toujours le moyen par lequel Mouret commence une aventure amoureuse avec ces demoiselles. Freud, comme moi, verrait probablement une allusion très sexuelle à cette formulation "tremper sa tartine dans une tasse de thé"!
Chapitre IX
"Maintenant, le chef de comptoir, introduit chez elle par Mouret lui-même, y allait parfois prendre le thé.
Commentaire: Cette introduction est très importante, car c'est à ce thé de Mme Desforges que Mouret et ce chef de comptoir feront la connaissance d'un baron, financier, dont ils auront tous deux besoin pour leurs projets commerciaux.
Chapitre XI
"Bouthemont, ce jour-là, arriva le premier chez Mme Desforges, au thé de quatre heures.
(...)
Puis, comme elle se plaignait en riant de n'avoir plus que des hommes à son thé de quatre heures, il s'oublia jusqu'à lâcher cette phrase:
- Je croyais trouver le baron Hartmann.
(...)
Mais la porte restait entrouverte, le domestique servait le thé.
(...)
Elle se leva, prit la théière, emplit les tasses.
(...)
Aussi, résolu à prendre une tasse de thé, rentra-t-il dans le grand salon avec son ami, plaisantant l'un et l'autre.
(...)
Entre chaque phrase, il buvait une cuillérée de thé, tout en protestant de son désespoir."
Commentaire: L'amour propre de Mme Desforges est blessé quand elle se rend compte que Mouret ne vient plus à son thé pour elle, mais pour rencontrer le baron. Plus tard, elle se vengera sur Denise et mettra Mouret en colère. Ce dernier prend alors une tasse de thé pour se donner un contenance et cacher ses émotions. Ainsi, si la voie moderne du thé chinois peut avoir une dimension spirituelle de recherche intérieure de vérité, ces thés parisiens montrent qu'il s'agit d'un jeu artificiel où règne le mensonge.
Comme dans ces autres romans, Zola crée des boissons imagées qui renvoient au thème central du livre. Ici, il en crée six!
Chapitre VII
"Puis, elle devait lui conter, pour la centième fois, son passage aux confections, les souffrances du début, les petites chambres malsaines, la mauvaise nourriture, la continuelle bataille des vendeurs ; et, tous deux, du matin au soir, ne parlaient ainsi que du magasin, le buvaient à chaque heure dans l'air même qu'ils respiraient."
Commentaire: le magasin 'Au bonheur des dames' exerce une présence continuelle dans ce romain. Il fait de l'ombre à ses concurrents, souvent littéralement, en s'agrandissant. Il est aussi omniprésent dans les pensées et paroles de ses concurrents.
"Bourras sentait bien l'étreinte dont craquait sa boutique. Il croyait la voir diminuer, il craignait d'être bu lui-même, de passer de l'autre côté avec ses parapluies et ses cannes, tant la terrible mécanique ronflait à cette heure."
Commentaire : Cette fois, c'est la boutique qui se transforme en ogre qui engloutit et boit les commerces autour de lui, comme cette boutique de parapluie de monsieur Bourras. Cet élargissement de ce nouveau genre de grand magasin est le thème du livre.
"A pleines mains, Denise lui prit les cheveux, ces cheveux superbes qui semblaient boire sa vie"
Commentaire: Geneviève, la cousine de Denise se meurt d'anorexie. La seule chose qui lui reste est sa belle chevelure qui semble se nourrir (boire) la vie de la jeune fille. On a encore cette idée que le cycle de la nature c'est que la vie se nourrit de la mort. C'est le principe de destruction créatrice de Schumpeter (1883-1950) avant sa formalisation par l'économiste autrichien!
Chapitre IX
"Comme les fleuves tirent à eux les eaux errantes d'une vallée, il semblait que le flot des clientes, coulant à plein dans le vestibule, buvait les passants de la rue, aspirait la population des quatre coins de Paris."
Commentaire: Le magasin Au bonheur des dames tire sa réussite de ses nombreuses clientes. Elles sont comme un flot d'eau que le magasin boit! Rien n'arrête l'eau dans la nature. La comparaison est donc bien trouvée pour montrer que ce nouveau type de magasin ne peut pas être arrêté, mais qu'il faut l'humaniser de l'intérieur (comme le fait Denise).
Chapitre XI
"- Le capital peut passer quinze fois, voici longtemps que je le prédis. Même, dans certains rayons, il passera vingt-cinq fois et trente fois...Ensuite, nous trouverons un truc pour le faire passer davantage.
- Alors, vous finirez par boire l'argent de Paris, comme on boit un verre d'eau?
- Sans doute. Est-ce que Paris n'est pas aux femmes, et les femmes ne sont-elles pas à nous?"
Commentaire: L'argent devient une boisson et Zola nous montre qu'il comprend le concept de la vélocité de l'argent. Il esquisse le business modèle de marques comme Zara qui n'arrêtent pas de faire tourner leurs stocks. L'idée est de rendre les stocks très 'liquides' (comme de l'eau), c'est à dire de les transformer rapidement en monnaie qui permette d'acheter de nouveaux stocks etc.
Chapitre XII
"Elle se trouvait toujours rue Neuve-Saint-Augustin ; mais on avait dû l'élargir, elle avait maintenant un lit de fleuve, où le continuel flot des marchandises roulait avec la voix haute des grandes eaux ; c'étaient des arrivages du monde entier, des files de camions venus de toutes les gares, un déchargement sans arrêt, un ruissellement de caisses et de ballots coulant sous terre, bu par la maison insatiable."
Commentaire: On retrouve la même idée que dans l'extrait précédent: toutes ses marchandises sont comme le ruissellement continu d'un fleuve. Elles convergent toutes au magasin.
2019 Printemps Baozhong de haute torréfaction
Ce Chaxi rend hommage au livre de Zola, car Mouret note que son comptoir sur les objets du Japon a connu un grand succès dans son magasin Au Bonheur des Dames. Ce comptoir commença comme une simple table près d'un escalier et finit par lui rapporter des millions. Cette anecdote du livre nous rappelle que l'Asie fut très à la mode en France dans les années 1860. Ainsi, mon bateau de thé est une porcelaine du Japon, les coupes sont de la fin de la dynastie Qing (autour de 1890) et le Baozhong torréfié est un Oolong dont l'invention remonte aux années 1870. Et mon Chabu est une ceinture de kimono japonais!
Si vous voulez en savoir plus sur les Baozhongs, j'ai créé ce set de dégustation et vais faire une série de cours sur ma chaine YouTube. Vous pouvez visionner l'introduction ici ou ci-dessous: