Friday, February 21, 2025

L'Assommoir de Zola, par-delà la boisson dans l'univers de Girard

Dans mon précédent article, j'ai recensé toutes les mentions de boissons dans L'Assommoir. Il y en a environ 300, ce qui explique que je n'ai pas analysé dans le détail chaque emploi, car cela m'aurait amener à citer presque chaque page du livre! Et, au fond, le message est simple comme une pub des années 80: "Un verre (de vin), ça va. trois verres (d'alcool fort), bonjour les dégâts!"

Mais ce livre m'a aussi fait penser à René Girard. Il y a d'abord le côté imitation mimétique. Gervaise veut devenir boutiquière pour imiter ces gens qui sont à leur compte et jouissent d'une plus grande liberté et de meilleurs revenus que leurs employés. Du moins, c'est ce qu'elle croit, car une boutique implique aussi des responsabilités vis-à-vis de ses clients. Ils attendent un service de qualité ou bien ils vont voir ailleurs. 

La chute de Gervaise dans l'alcoolisme et la misère ne diminuent pas l'attrait de tenir une boutique. Au contraire, sa boutique est convoitée par Véronique même avant sa faillite. Or, Véronique est un peu le double girardien de Gervaise. Le roman s'ouvre sur leur bagarre dans un lavoir. Et lorsque Véronique obtient la boutique de Gervaise, elle obtient aussi les faveurs du premier amant de Gervaise, Lantier. Et il est piquant de se rappeler que Lantier fut le petit ami de sa sœur. Ce ne sont plus des doubles, mais des triples! 

Zola me semble aussi conservateur sur les mœurs qu'il l'est sur l'alcool. Les ménages à trois sont aussi toxiques que l'excès d'alcool, même s'il montre qu'ils arrivent sont plus le fruit des circonstances, de situations où les protagonistes agissent par imitation mimétique.

Pour Girard, cette imitation par les doubles conduit à une violence qui s'achève par la recherche d'un bouc émissaire unique sur lequel va se diriger la violence du groupe. Et Girard dit que pour être un bouc émissaire efficace, cette personne doit être ni trop étrangère, ni trop liée au groupe. Or, Gervaise n'est pas Parisienne, mais originaire de Provence. De plus, souvent le bouc émissaire aura une infimité. Or, Gervaise est boiteuse! Et, comme tout bouc émissaire, Gervaise est innocente. Elle est l'un des personnages les plus attachants et gentils du roman. C'est cela qui rend sa fin si triste.

Chez Coupeau, le mari de Gervaise, sa chute dans l'alcoolisme provient d'abord de sa chute du toit de l'immeuble où il travaillait. Mais dans ce malheur, il eut la chance d'avoir sa femme qui sacrifia ses économies pour le sauver. Il aurait pu retrouver, lentement, le droit chemin, celui du travail. Mais à force de fréquenter les marchands de vin, il s'est lié d'amitié avec trop de soûlards et a imité leurs oisiveté et leur consommation d'alcools forts.

Conclusion: Pour s'élever, s'améliorer, il ne suffit pas d'imiter les bons modèles (les boutiquiers), mais il faut aussi de la ténacité et du travail pour ne pas s'éloigner du chemin de la prospérité. Or, les tentations sont nombreuses et les mauvais exemples aussi. Et si l'alcool vous aide à prendre les mauvaises décisions, le thé permet de garder la tête froide. Cela ne veut pas dire qu'on ne prend que des bonnes décisions avec le thé ou bien que le thé permet d'éviter les autres vices (paresse, gourmandise...). Le grand avantage du thé est qu'il préserve toutes vos facultés et votre responsabilité. 

Note: Nous reprenons les cours live du dimanche en vidéo sur ma chaine YouTube le 23 février. J'essairai de ne pas vous assommer en parlant de l'Assommoir!

Saturday, February 15, 2025

Les boissons dans L'Assommoir de Zola

Concubine Oolong de Hsin Chu, 2021
Ce septième roman de la saga des Rougon-Macquart est l'un des plus connus de Zola. Dans L'Assommoir, on peut dire que la boisson, c'est-à-dire l'alcool, tient le rôle principal et accompagne Gervaise Macquart du début à la fin de l'histoire. En effet, si elle est née avec une jambe malformée, c'était dû aux coups de pieds de son père, saoul, sur le ventre de sa mère enceinte. Aussi, ce roman est-il d'abord un premier 'J'accuse!' contre le fléau qui faisait des ravages dans les classes populaires: l'alcoolisme.

S'il n'y a qu'une seule mention de thé, l'auteur en fait 10 d'eau (dont 2 celle de Seltz), 5 de tisane, 4 de lait et 2 de bouillon. Il y a aussi 44 mentions de café, soit comme boisson, soit comme lieu de consommation.

Et puisqu'il n'y a qu'une seule mention du mot 'thé' et que cela reste notre boisson favorite sur ce blog, citons le passage au chapitre 10 en entier: 

"Virginie, après des hésitations, s'était décidée pour un petit commerce d'épicerie fine, des bonbons, du chocolat, du café, du thé. Lantier lui avait vivement conseillé ce commerce, car il y avait, disait-il, des sommes énormes à gagner dans la friandise."

Commentaire: Dans ce quartier de la Goutte d'Or, les gens sont parmi les plus pauvres de Paris. Certes, il y a 44 mentions de 'café', mais ni les bonbons, ni le chocolat ni le thé apparaissent dans le quotidien des personnages de L'Assommoir. Zola laisse donc entendre que cette boutique finira comme celle de Gervaise, et que Lantier, le premier amant de Gervaise, donne de mauvais conseils. En effet, nous avons vu dans les romans précédents que le thé est l'apanage de la haute bourgeoisie et de la noblesse, mais que le Français moyen du milieu du dix-neuvième siècle en consomme très peu.

Dans la catégorie des boissons alcoolisées, on trouve 34 mentions de marchand de vin, 69 mentions de vin, 4 de vin cacheté, 4 de vin à la française (c'est du vin chaud), 10 mentions de litres comme synonyme de vin, 10 mentions de canon, une mention de chopine (bouteille de vin), une mention de pichenet (vin de mauvaise qualité), une mention de l'expression 'boire un coup', une mention de tournée générale et 2 mentions de bière.

On trouve aussi beaucoup d'alcools forts dans ce roman. 23 mentions d'eau-de-vie, 14 de vitriol (alcool très fort de mauvaise qualité), 13 mentions de boire la goutte (au sens d'alcool fort), 7 mentions d'anisette, 5 de cassis, 5 de prune, 4 de liqueur, 3 de rhum, 3 de cric (mauvais alcool fort en argot, vieilli), 2 d'absinthe, 2 d'alcool, 2 de schnick (alcool fort de qualité inférieure), une mention de vermouth, une mention rogome (liqueur forte en langage populaire, vieilli). Zola utilise aussi des expressions imagées: 3 fois il parle de casse-poitrine, 2 fois de tord-boyau, une fois de chien tout pur, une fois de cochonnerie et une fois de brûlot.  

En effet, l'histoire s'articule autour de ce passage de la consommation de vin à celle d'alcools forts. Au chapitre 2, Coupeau (le futur mari de Gervaise) explique qu'il ne touche pas aux eaux-de-vie, car son père, "zingueur comme lui, s'était écrabouillé la tête sur le pavé de la rue Coquenard, en tombant, un jour de ribote, de la gouttière du numéro 25 ; et ce souvenir, dans la famille, les rendait tous sages. (...) il aurait plutôt bu l'eau du ruisseau que d'avaler un canon gratis chez le marchand de vin."

Au chapitre 4, "Un jour, pourtant, il était rentré gris. Alors, Madame Goujet, pour tout reproche, l'avait mis en face d'un portrait de son père, une mauvaise peinture cachée pieusement au fond d'une commode. Et, depuis cette leçon, Goujet ne buvait plus qu'à sa suffisance, sans haine pourtant contre le vin, car le vin est nécessaire à l'ouvrier."
Zola est donc loin de prôner l'abstinence. Le vin est la boisson populaire et on en boit de nombreux litres aux fêtes. Au chapitre 6, "elle voulut rire, le coucher, comme elle faisait les jours où il avait le vin bon enfant.", mais ce jour-là "il leva le poing sur elle", car il avait "le vitriol de l'Assommoir dans le sang empoisonné". 

A la fin du chapitre 4, Zola continue dans la même veine: "Autrefois, on avait bien raison de le blaguer, attendu qu'un verre de vin n'a jamais tué un homme. Mais il se tapait la poitrine en se faisant un honneur de ne boire que du vin ; toujours du vin, jamais de l'eau-de-vie ; le vin prolongeait l'existence, n'indisposait pas, ne soûlait pas. Pourtant, à plusieurs reprises, après des journées de désœuvrement, passées de chantier en chantier, de cabaret en cabaret, il était rentré éméché."

Commentaire: Zola montre que l'accident de Coupeau lui a fait perdre l'habitude de travailler. Son oisiveté est source de vice: elle le met sur la mauvaise pente de la consommation excessive d'alcool. Cela commença par le vin, mais la consommation de liqueurs fortes devient de plus en plus fréquente.

Au chapitre 10, "Il redevenait gentil, depuis qu'il buvait de la tisane et qu'il ne pouvait plus laisser son cœur sur les comptoirs des mastroquets."

Commentaire: Zola montre que si les alcools forts rendent Coupeau violent et méchant, le sevrage le rend gentil à nouveau. Zola laisse poindre un espoir de rémission. Mais pas pour le couple principal de l'histoire.

Au chapitre 12, Zola écrit: "Plantée devant l'Assommoir, Gervaise songeait. Si elle avait eu deux sous, elle serait entrée boire la goutte. Peut-être qu'une goutte lui aurait coupé la faim. Ah! elle en avait bu des gouttes! Ça lui semblait bien bon tout de même. Et, de loin, elle contemplait la machine à soûler, en sentant que son malheur venait de là, et en faisant le rêve de s'achever avec de l'eau-de-vie, le jour où elle aurait de quoi."

Commentaire: La descente aux enfers est si totale que la pauvreté impose la sobriété à Gervaise, mais son état est si misérable que l'alcool est sa seule issue. Remarquons en passant que l'eau-de-vie devrait s'appeler eau-de-mort, car elle désire mourir d'ivresse.

Le dénouement touche d'abord Coupeau au chapitre 13 et le responsable de sa mort ne fait aucun doute : "C'était le vitriol de l'Assommoir qui donnait là-bas des coups de pioche. Le corps entier en était saucé, et dame ! il fallait que ce travail s'achevât, émiettant, emportant Coupeau, dans le tremblement général et continu de toute la carcasse.
Les médecins s'en étaient allés. Au bout d'une heure, Gervaise, restée avec l'interne, répéta à voix basse:
- Monsieur, monsieur, il est mort..."

Une page plus loin, c'est au tour de Gervaise. Mais elle ne fut pas chanceuse. Sa mort ne fut pas aussi rapide que celle de son mari. "Dès qu'elle possédait quatre sous, elle buvait et battait les murs. (...) La mort devait la prendre petit à petit, morceau par morceau, en la traînant ainsi jusqu'au bout dans la sacré existence qu'elle s'était faite. Même, on ne sut jamais au juste de quoi elle était morte. On parla d'un froid et chaud. Mais la vérité était qu'elle s'en allait de misère, des ordures et des fatigue de sa vie gâtée."

Commentaire: Le lecteur retient surtout le rôle de l'alcool dans la déchéance et la mort affreuse de ces deux personnages. Rarement un roman n'a fait autant pour combattre un fléau de la société. Je me suis sens dégoûté de prendre une cuite, que ce soit au vin ou avec une liqueur. 
Concubine Oolong de Hsin Chu, 2021
Le meilleur remède que je connaisse pour se passer d'alcool n'est pas la tisane, mais le thé et surtout le Oolong torréfié. Ses arômes ont quelque chose de capiteux, de complexe et de stimulant. Mais au lieu d'embrumer l'esprit, le thé le clarifie. Même la couleur de cet Oolong ressemble à celui d'un Cognac ou d'un whisky!

Wednesday, February 12, 2025

The seasons of Dong Ding Oolong

Let me give you some feedback on my tea event in France during my recent trip there! The light in those pictures shows that we had a sunny but ice cold day for the event. This was a reminder of what real winter is like in Alsace. Actually, usually it's cloudy and we were lucky to have so much sun. These winter conditions and the location (a village in North Alsace) explain why only 2 people attended the class. They felt very lucky. We were a perfect number of people to drink tea according to Chaozhou Gongfu Cha traditions!  
Their luck continued with my choice of subject for the morning class: roasted Oolongs! This class is particularly warming and is a perfect fit for the cold winter weather! And their luck went through the roof with the very first we tasted: a Da Hong Pao mix using the same 3 cultivars as the 4 original Da Hong Pao bushes in Wuyi! This tea alone was worth the price of the class and I was glad to share it with both my students who each travelled over 100 km to attend! It was interesting to start with Da Hong Pao, because this tea is the most famous WuYi Yan Cha and Yan Cha were the first Oolongs invented in China. This is like the gold standard of a traditional Oolong:: hand harvested in late spring, processed in small, single batches, partially oxidized and well roasted over a pit of glowing charcoal. And the result is amazingly good, a balance of fresh and ripe, light flowers and heavy mineral aromas. And he whole is making the mouth feel clean and salivating!  

After this introduction, we studied the difference between the summer, fall and winter Dong Ding Oolongs included in this new sampler. We felt the lineage between Yan Cha and charcoal roasted Oolong, especially the winter version. It's fantastic how full body, mellow and balanced this affordable Hung Shui Oolong tastes! The fall season version was very surprising and interesting. That's why I have included it in the sampler of Seasons of Dong Ding. I will base my coming online YouTube classes on this sampler. Nothing can replace the tasting of the brew, so I recommend that you purchase it in order to learn precisely how Dong Ding Oolong evolves from one season to another. The sampler also contains a Dong Ding competition Oolong to taste the difference between competition Dong Dong Oolong and Oolong from the Dong Ding area! 
The Tea-Masters Boutique renews its 20% and 25% discounts to celebrate the 2025 Chinese New Year now that I'm back in Taiwan! Use these discounts to enjoy high quality tea in cold Europe and North America! A warm cup of delicious Oolong tea from Taiwan is the best preventive medicine against winter!