Après 15 jours passés en Crète (sans mon eau minérale habituelle et ma tetsubin), j'ai pu à nouveau remarquer l'importance de l'eau pour le thé. L'eau trop calcaire étouffe les arômes les plus subtils et donne une petite amertume désagréble aux excellents Oolongs que j'avais amené avec moi. Il m'a vite fallu acheter une eau peu minéralisée (Samaria) et détartrer la bouilloire (en plastique... oh desespoir!) de l'appartement. Pour cette reprise d'activité du blog (après un déménagement, l'installation d'une nouvelle ligne ADSL, un voyage et le remplacement de mon ordinateur), je vous propose un retour aux sources avec cet article sur l'eau pour le thé:
Une coupe de thé contient plus de 99% d’eau. C’est donc l’ingrédient principal du thé, bien avant les feuilles de camelia sinesis. De plus, c’est seulement sous l’influence du contact avec l’eau chaude que l’on obtient cet exquis breuvage. Pour obtenir un bon thé, il faut donc utiliser une bonne eau.
Lu Yu (733-804) fut l’un des premiers maitres de thé chinois à avoir étudié la question en détail. Pour lui, la meilleure eau provient des sources qui coulent doucement en montagne, puis viennent les eaux de rivière de plaine qui ne coulent ni trop vite, ni trop lentement. Les eaux de puits sont les moins bonnes. L'eau puisé au bas des cascades n'est pas bonne non plus. Elle est trop acide, vivace et donne mal aux épaules.
De nos jours encore, à Taiwan, de nombreux amateurs de thé cherchent leur eau en montagne en suivant les conseils de Lu Yu. Les meilleures eaux de source se caractérisent par un goût moelleux. Elles glissent dans la gorge sans amertume, lourdeur ou acidité. Elles se font discrètes, légères, moelleuses et vivaces pour mieux rehausser le thé. Elle sont en général peu minéralisées et naturellement chargées de vie.
En Europe, la qualité de l’eau potable du robinet diffère énormément d’une ville à une autre. Celle de ma maison familiale est très calcaire. Elle crée un dépôt saumâtre qui flotte sur mon thé. Un filtrage simple ne suffit pas à lui enlever sa lourdeur. Mais si le filtrage est trop fort, l’eau pure obtenue par osmose inverse ou distillation risque d’être trop fade et plate. Une solution est de se tourner vers les eaux minérales les moins minéralisées. Il en existe une grande gamme en France. Je recommande plus particulièrement celles avec un résidu sec inférieur à 200 mg/l, un pH au-dessus de 7 et peu de sodium.
Mais la qualité de l’eau du thé ne s’arrête pas là. Encore faut-il savoir comment et dans quoi la bouillir. Ici encore, Lu Yu s’était posé la question il y a plus de 1000 ans.
Il nous dit de d’abord de porter l’eau à ébullition avec un feu moyen. L’eau doit impérativement avoir bouilli pour être prête à l’emploi. Les Chinois disent d’ailleurs que l’eau est ‘ouverte’ (開) pour signifier l’ébullition. Une eau ‘fermée’ n’arrivera pas à faire sortir les meilleures fragrances du thé. Un signe visuel de l’ébullition est l’appartition de bulles dans l’eau : lorsque ces bulles ont la taille d’yeux de crabes, l’eau est prête. On arrête alors la cuisson de l’eau, afin d’éviter qu’elle ne ‘vieillisse’ et se vide de son oxygène.
Lu Yu a aussi testé différents matériaux de bouilloire. Pour lui, l’argent ou l’or donneront les meilleurs résultats. J’ai un jour eu l’occasion de vérifier cela au moyen de la bouilloire en argent, mais leur prix les rend hors de portée du commun des mortels. Un autre matériau employé en Chine du temps de Lu Yu est la fonte. De nos jours, on trouve surtout des bouilloires japonaises, appelées tetsubin. Les meilleures sont celles sans émaille. Certes, elles rouillent un peu, mais elles apportent ainsi un peu de fer à notre organisme. Le goût de l’eau s’en trouve aussi plus arrondi et agréable. On peut aussi chauffer son eau dans une bouilloire en céramique, sans émaille de préférence. En effet, le mieux est d’utiliser un matériau un peu poreux qui laisse l’eau chaude respirer. Les matériaux les moins bons sont le plastique et l’acier inoxidable.
2004 HTC shou pu'er and 2011 Xishuangbanna
16 hours ago
19 comments:
Welcome back Stéphane ! Tu nous as manqué ! On attend tes posts sur tes dernières trouvailles en matière de wulongs etc etc...Si tu etais en Crete, tu n'etais donc pas au festival de Oriental Beauty à Hsinchu County ? J'aimerais bien en savoir plus sur cet evenement sur un thé qui me passionne...
C'est amusant, j'allais justement écrire mot pour mot "Welcome back Stéphane! Tu nous as manqué!". Inutile de le répéter donc ;-)
Merci Lionel et Emmanuel pour vos pensées. C'est sympa de votre part!
Le festival a lieu ce weekend. Je vais essayer d'y aller, mais ce n'est pas encore certain.
nin hâo Erler Stéphane jiàoshi cha,
"L'eau, mère du thé", je te suis reconnaissant pour tous tes postes la dessus d'y a bien un ou deux ans déja!
j'ai pris le reflexe bien 3 à 4 fois par jour de vider la bouilloire, car une eau non filtré c'est pas bon pour le moral!
J'ai suivi ton conseil, et je ne regrette pas ma conversion à l'eau ionisé que teaparker apelle 'l'eau-nano'...
Nous sommes tous impatient de connaitre tes aventures du temps d'après les récoltes de cette année!
Bonjour Stéphane ! Je suis vraiment très heureuse de voir que tu es de retour, je vais avoir le plaisir de continuer à te lire. Je commençais à m'inquiéter un peu de toi.
C'est toujours un plaisir de lire tes postes et d'apprendre de tes conseils. Chaque soirée je bois ton thé que je trouve vraiment bon.
Merci
Marco
On a failli attendre....
Heureux de te retrouver ;-)
Salut Stéphane, super que tu sois de retour - tu nous a manqué!
En matière d´eau, j´ai presque tout faux (eau -cependant filtrée- de Strasbourg (!!!), bouilloire en plastique/inox). Mais j´arrive quand-même à avoir un thé à peu près correct (sûrement parce que je n´ai pas la comparaison... heureusement ;-). Je pense essayer le charbon de bambou... apparemment cela peut encore améliorer le goût du thé.
Bon retour chez toi, et merci pour tes articles!
Suzanne
je ne sais pas si on te l'a encore dit mais content de te relire :-D
effectivement l'au a son importance et j'allais dans les semaines qui suivent faire un article comparatif entre deux eaux sur un thé que je connais bien et que j'apprecie : la brique 2000 de la cnnp . Mais bien sur je n'ai pas ton savoir et ton erudition du thé ;-) , je fais ca en diletente ...
Salut Stéphane, moi aussi je suis heureux de te revoir, vivement la suite de tes articles toujours aussi passionnant à lire.
A bientôt,
Bertrand
Salut Stéphane,
No idea what you wrote, but nice to see you are back :-)
Bienvenue à la maison.
Histoire de faire original, content de te lire.
J'espère que tu as bien profité de la coupure !
Histoire de retourner dans le sujet, je me suis étonné dernièrement de voir dans le numéro 2 de "art of tea" un article qui disait à peu près le contraire de tout ce que je croyais à propos de l'eau.
Je ne l'ai pas à proximité donc je ne peux pas ressortir le nom de l'auteur ou les citations exactes, mais si je ne m'abuse il déconseillait les bouilloires en fonte (rien que ceci décrédibilise un peu l'article à mes yeux, mais passons), disait qu'il faut faire bouillir l'eau vite, et ne surtout pas en ajouter au fur et à mesure mais vider la bouilloire complètement avant de remettre de l'eau.
Il y avait peut-être d'autres contradictions, mais ce sont celles que j'ai gardées à l'esprit.
Je tends pour l'instant à plutôt me fier à ce que j'ai lu sur ce blog étant donné que d'expérience j'ai eu de bons résultats avec, mais je trouve vraiment étonnant que ce magazine sérieux dise quasiment le contraire.
Quelqu'un a-t-il une idée de l'explication ?
(ou connaît l'auteur, a un avis sur la fiabilité de ce magazine, etc...)
Merci
Jérôme.
Merci Jerome pour ton commentaire. Je pense que le mieux je vais bientôt faire un article sur l'eau en anglais et en explicitant les points que tu mentionnes.
Bon retour Stéphane.
Après cette pause probablement méritée, il te faut te remettre à la tâche.
J'ai hâte de découvrir les thés que je t'ai commandés ;o)
Bonjour Stéphane,
Très intéressant cet article sur l'eau, merci à toi !
Préparant mon thé à l'eau du robinet, je vais aller ce soir m'acheter de l'eau minérale pour le préparer... car j'ai moi aussi cette couche au dessus de la liqueur qui doit en cacher beaucoup malheureusement...
Petite question à propos du calcaire, j'ai utilisé trois fois de l'eau du robinet pour mes GFC avec ma nouvelle théière en terre, malheur, il y a un dépôt de calcaire au fond de la théière (à l'intérieur) qui se propage lorsque je gratte aux doigts, que faire pour l'enlever stp, ça me ronge le moral...
Comme je compte la pré-culotter, je pense continuer à gratter, mais il y a p-ê une autre solution ? Nettoyage à l'eau minérale ?
Merci pour l'aide que tu pourrai m'apporter !
Cordialement
Julien
Bonjour,
Après la lecture de votre article je m'interroge pour mon utilisation 'maison' sur une bouilloire électrique ...
Mais ce monde électrique : o ) est remplie de méchante "bouilloire" souvent en Plastique ou Inox (acier Inoxydable)! Une solution ?
(Je n'ai pas la possibilité d'utiliser un brûleur ou une plaque électrique)
Je vous remercie par avance !
Ah ! Les "yeux de crabe", c'est poétique mais dépassé, aussi. La taille des bulles n'est pas un critère fiable pour savoir à quelle température se trouve l'eau : l'ébullition et la taille des bulles dépend notamment de l'altitude et du matériau de la bouilloire. Bien souvent, si l'on s'en limite à des yeux de crabes, l'eau ne dépasse pas les 85°C, alors que les Oolongs en perles nécessitent un maximum de chaleur. Il me semble qu'une eau trop bouillie mais bien chaude vaut mieux qu'une eau pas assez chaude, qu'en penses-tu Stéphane ?
Shiokoji,
En effet, les bulles dépendent du matériau de la bouilloire. Avec ma tetsubin ancienne, j'obtiens des bulles plus petites (et plus longtemps) qu'avec une tetsubin neuve ou une bouilloire en inox. L'important est donc aussi de bien connaitre sa bouilloire pour savoir à quelle température son bruit/ses bulles correspondent.
Sinon, c'est vrai aussi que les Oolongs préfèrent une eau très très chaude.
"Le thé est l'esprit de l'eau,
l'eau est le corps du thé"
TheTea Garage.
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