Tuesday, December 19, 2023

Il est infusé le divin nectar


Morceau de puerh cru compressé (avant)
Une manière pertinente de classer les thés est selon leur degré de mémorabilité:

1. Ceux qu'on oublie aussitôt les avoir bus tellement ils ont peu de saveurs et de longueur en bouche. (Les médiocres).

2. Ceux qu'on aimerait oublier le plus rapidement possible, car on les trouve imbuvables. (Les mauvais).

3. Ceux qui laisse un souvenir agréable et dont on va mémoriser le nom et les caractéristiques (le cultivar, la saison, l'origine...) pour pouvoir le réinfuser un autre jour. (Les bons)

4. Ceux dont on se souvient encore des semaines, des mois, voire des années après leur dégustation tellement ils nous ont marqué, surpris par leur pureté, leur longueur en bouche... (Les exceptionnels).

Puerh cru petit LuYin décortiqué (après)
Ce puerh cru 'petite marque verte' d'une trentaine d'années a eu cet effet sur moi le mois dernier! A peine dégusté, et malgré mes plus de 20 ans de dégustation de bons et de grands thés, il a réussi à me surprendre et à me mettre une baffe tellement il est hors du commun avec sa combinaison de pureté et de puissance harmonieuse. Et pourtant, je l'avais joué en mode 'gaiwan en porcelaine', ce qui n'est pas forcément l'instrument le plus noble et le plus raffiné pour infuser un grand thé. Mais ce jour-là, je voulais boire ce puerh 'nature', sans chichis et sans la magie d'Yixing. Voyons ce qu'elles ont ces feuilles de petite Lu Yin (marque verte), le nom qui fait référence au caractère 'Cha' imprimé en vert au centre de l'emballage en papier. Les Chinois rajoutent l'adjectif 'petit' par affection et pour montrer qu'il s'agit d'une galette d'une nouvelle génération. Ainsi, 'petite marque verte' fait référence à la galette 'marque verte' (Lu Yin) des années 1960. Cette légendaire galette Lu Yin est considérée par les connaisseurs comme l'ancêtre de la galette '7542' (formule créée en 1975) de la firme Menghai (maintenant renommée Da Yi).
C'est ce qui se faisait de mieux et de plus raffiné comme puerh durant l'ère du monopole du thé par la CNNP (China National Native Produce). 
La couleur est d'une rare intensité et transparence (cette photo montre la 3è ou 4è infusion!). Les feuilles s'ouvrent complètement, marque d'un puerh cru).
A sec, ces feuilles ne sentent pas fort. Il y a une légère odeur de grenier, là où l'on range la décoration de Noël de janvier à décembre et nos affaires d'enfance. Cette absence d'odeur est normale pour un thé de cet âge. L'important est ce que les feuilles renferment et vont donner lors de l'infusion. 
Ces arômes-là furent grandioses autant au niveau de leur pureté que de leur harmonie et de leur puissance. Quelle présence! C'est tellement parfait qu'on croirait vivre un moment d'éveil spirituel! La lumière s'allume en soi! Et si c'était cela la plénitude? 
Cette expérience me fait penser au changement d'attitude qui vient avec l'âge. Quand on est jeune, nos exigences sont moindres, car les mauvaises expériences et les mauvais thés font aussi parti de l'apprentissage et de la vie. Mais pour les grandes occasions, comme un Noël qu'on passera avec ses parents retraités, on sait qu'il n'y en aura plus 36 des moments comme celui-ci. Alors pour être certain d'avoir d'être à la hauteur et de créer des souvenirs inoubliables, on choisit les ingrédients de grande qualité et on leur rajoute tout son savoir-faire et, encore plus inestimable, tout son amour. En effet, les fêtes de fin d'année sont l'occasion d'aller à l'essentiel, au meilleur. Sortez vos meilleures feuilles et célébrez la vie et la naissance de Jésus si vous êtes croyant! 
Et si vous ne l'êtes pas, alors peut-être un nectar divin vous donnera la foi!

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