Le Cha Xi inspiré de la dynastie Ming avec Cha Ren Ya Xin fut l'occasion de montrer ma coupe Ming à Teaparker. Son verdict: c'est un faux, une imitation de haute volée. D'un point de vue du toucher, des couleurs, des petits défauts de cuisson... cette coupe imite parfaitement une coupe ancienne.
Alors à quoi remarque-t-il que ce n'est pas un original? A un petit détail de style: les coupes Ming ne comportent pas une ligne bleue, mais deux. Voir cet exemple ou celui-ci. On voit que le trait bleu en haut de ces coupes est double, alors qu'il n'y a qu'un trait sur la mienne.
Heureusement pour moi, cette coupe ne m'avait rien coûté: ébréchée, on me l'avait offert à l'occasion d'un autre achat. Et d'un point de vue technique, elle reste très réussie: elle est faite à la main et son émaille particulière donne un goût plus naturel et moelleux au thé que la plupart de mes autres coupes modernes.
Cette tasse fut aussi l'occasion pour Teaparker de nous montrer pourquoi on appelle les gaibei, gaiwan aussi zhong. (Ceux-ci datent de la dynastie Ming.)
Zhong veut dire cloche en chinois, et c'est bien la forme qu'on obtient lorsque l'on retourne cette coupe ou la coupe d'un gaiwan/gaibei!
The Chanoyu Hyaku-shu [茶湯百首], Part III: Post 58.
16 hours ago
14 comments:
>> "Alors à quoi remarque-t-il que ce n'est pas un original? A un petit détail de style: les coupes Ming ne comportent pas une ligne bleue, mais deux"
???...
Il est tout aussi facile de faire une contrefaçon avec deux lignes bleues !! Je ne vois donc pas comment on peut être si sûr de l'authenticité à travers ce détail, ça n'a pas de sens !
Philippe,
S'il y avait eu 2 lignes bleues, l'imitation aurait été plus difficile à démasquer.
Je ne dis pas qu'on peut être certain de l'authenticité s'il y a 2 lignes, mais qu'on peut être certain que ce n'est pas authentiquement Ming si il n'y a qu'une seule ligne.
Pour s'assurer de l'authenticité, il faut que tout (matière, forme, couleurs, style...) concorde. Et même là, mieux vaut encore avoir des détails de confiance sur la provenance. La Chine est le pays des imitations et certains ateliers font des choses tellement bien que grand nombre d'experts n'y verraient que du feu (selon Teaparker).
"La Chine est le pays des imitations et certains ateliers font des choses tellement bien que grand nombre d'experts n'y verraient que du feu (selon Teaparker)."
Oui, il faut vraiment être prudent avec la vaisselle chinoise ancienne (ming , qing), j'ai eu en main des pièces de céladon dont on m'a explicitement dit qu'elles étaient des fausses et le même genre de pièces sensées être vraies (dans une boutique sérieuse), personnellement je n'ai pas pu voir la différence... le faux avait même l'air plus "authentique", car on avait pris un grand soin à lui donner une apparence antique.
>> "Je ne dis pas qu'on peut être certain de l'authenticité s'il y a 2 lignes, mais qu'on peut être certain que ce n'est pas authentiquement Ming si il n'y a qu'une seule ligne. "
Je n'avais pas compris ainsi, en effet, c'est logique ;-)
Stéphane,
Les codes étaient-ils si stricts à cette époque en Chine qu'il était impensable qu'un artisan ne dessine qu'une seule ligne au lieu de deux?
pas toujours simple de distinguer un vrai d'un faux. Heureusement certains font des grosses erreur qui facilite les choses ;) de toute façon le plus l'important ce n'est pas vraiment l'autentisité mais surtout la qualité du produit (sauf en cas de collection ou de recherche d'un véritable objet ancien).
Sinon je comprends bien pourquoi on appel un zhong un zhong, l'explication est claire mais pourquoi l'appeler également gaiwan ou geibei (et peut-être encore d'autres noms que je ne connais pas).
L'un d'entre eux ne veut pas dire "tasse avec couvercle"? il me semble que j'ai lu ça quelque part.
au sujet des lignes, ça me fait penser aux personnes autorisées à copier des tableaux célèbres dans les musées ( certains sont remarquablement bien fait ...) avec pour condition de changer la dimension de la toile ( 1 format + carré ou allongé que l'original). Peut-être ici l'artisan ou l'atelier a signifié : cela ressemble à 1 vrai Ming mais ça n'en est pas vraiment un, il manque 1 ligne... Donc seuls les experts-connaisseurs ne vont pas s'y tromper !
Merci pour vos commentaires. Les vraies et les fausses antiquités, voilà un sujet qui ne finit pas de faire couler beaucoup d'encre!
Emmanuel,
Oui, à l'époque les codes étaient très stricts, car dans la Chine impériale c'était l'empereur qui faisait la mode. Il y a des évolutions ou des périodes dans chaque dynastie, mais cela reste des ensembles homogènes où chacun suivait la direction de l'empereur.
Benead,
Gai (couvert) wan (bol)
Gai (couvert) bei (coupe)
Ginkgo,
Merci de nous rappeler qu'il n'y a pas que les Chinois qui copient (même si la médaille d'or leur est due s'il s'agissait d'une discipline olympique). Et c'est aussi une façon de travailler la technique que d'arriver à faire des pièces comme autrefois.
Bravo,Stéphane....tu as une fois de plus réussi ton coup...une petite ligne manquante et tout le petit monde du thé réagit.Aujourd'hui j'ai eu au moins autant de plaisir à te lire qu'à lire l'ensemble des commentaires.C'est beau l'effervescence
Très instructif.
Et tout ça me fait penser que les japonais savent aussi très bien copier, à la différence qu'ils font toujours mieux que l'original, sacré nippons.
Un professionnel du thé chinois me signale que zhong désignant le gaïwan et zhong désignant la cloche sont deux mots différents, qui s'écrivent différemment, sont chacun composés de deux caractères sans qu'il y ait de caractère commun. La forme du gaïwan et celle de la cloche ne rapprochent pas les deux mots, aucune "dérivation" métaphoriques entre les deux. C'est un peu comme "taule" et "tôle" en français.
Il m'a montré comment les deux mots s'écrivent : pour le zhong qui désigne l'ustensile on a un caractère qui signifie "milieu" et un deuxième qui renvoie, si je me souviens bien, à la notion de contenant (de type bol) : pour le zhong qui désigne la cloche, un caractère qui signifie "or" et un autre ...dont je ne rappelle pas ce à quoi il renvoie ! Pour ce dernier, l'écriture renvoie au son. Pour le premier, l'écriture renvoie à la forme de l'objet.
ah, au fait, je lui ai demandé pour le filtre des théières (trous ou nid d'abeille), on se posait la question dans un post précédent est c'est aussi, presque, une histoire de "copie". Le bec sans filtre est la première occurrence. Le bec avec filtre "trous" est arrivé ensuite. Le filtre nid d'abeille est une forme spécifiquement japonaise ; il a été repris par les chinois taïwanais, et caractérise le plus souvent les terres moulées produites en série, les potiers taïwanais travaillant à la main privilégient le filtre "classique" (bec "nu" ou filtre à trous plat).
Stéphane,
Dans un livre que je ne siterai pas, édité par une boutique de thé parisienne qui vend à travers le monde et sur internet... j'ai trouvé ceci:
"Zhong, terme le plus usité, serait une déformation du verbe "chong", "verser de l'eau", mais le terme précis est Gaiwan, "bol à couvercle".
Pour gaiwan ça confirme ce que tu a dis mais pour zhong on a une autre version, les deux semblent correcte. Selon toi ce sont deux origines, deux hypothèses différentes ou simplement deux significations différentes mais tout aussi courante?
Flo,
Oui, cela s'écrit différemment. Merci de faire la remarque. En lisant mon article, on pourrait penser que cela s'écrit pareil. Désolé pour la confusion. C'est vrai qu'un zhong (gaiwan/gaibei) est différent d'une cloche en métal (or) et qui fait un son, puisque notre ustensile à thé est posé sur une assiette (et n'est ni en métal et ne fait pas de son).
Il se peut que le son similaire soit une coincidence. Par contre, selon Teaparker, la forme du zhong est inspirée de la forme des cloches. Sur ce point, il fut clair.
Benead,
Il est vrai qu'il y a un verbe avec une prononciation similaire et qui a le sens de verser. Où sont les linguistes chinois quand on a besoin d'eux?
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