Après la fraicheur d'un thé vert en bol noir et le raffinement d'un Wuyi Yancha en zhuni, je passe à un tout autre registre. Pour bien marquer l'occasion de ces infusions en montagne, j'effectue un autre voyage, dans le Yunnan cette fois-ci, avec du puerh.
Adepte de ces contrastes entre des extrêmes si lointains qu'ils finissent par se rejoindre, j'ai choisi mon puerh vrac sauvage d'Yiwu de 1990 et ma théière en argent pour l'infuser! Est-ce bien raisonnable? Sûrement pas, mais soyons aventurier et un peu magicien!
En théorie, c'est une théière en glaise, en terre cuite au feu de bois, qui irait le mieux avec le puerh et ses odeurs de tourbe et de campagne. L'argent convient surtout pour les thés verts les plus fins, aux bourgeons si jeunes et frais que seule la haute conductivité thermale de l'argent est capable d'ouvrir. L'argent accentue donc les caractéristiques du thé.
Or, ces feuilles en vrac d'Yiwu de 1990 ont eu le temps de s'affiner. Pour bien apprécier leur pureté, je n'en utilise pas beacoup, juste ce qu'il y a sur ma petite assiette.
L'infusion est d'une grande clarté et limpidité.
C'est un moment ensoleillé, mais bercé d'une fraicheur automnale. Pareillement, ce vieux puerh cru est tout en contraste. Au premier contact dans la bouche, il glisse, il coule comme une eau soyeuse et chaleureuse. Il laisse un arrière-goût tranché, électrique, cristallin d'une grande fraicheur. Mais ses légères odeurs sont camphrées et boisées. Tout le palais et la langue s'activent maintenant dans un va-et-vient d'énergie. Légerté et fraicheur, profondeur et persistance coexistent. J'y retrouve la jeunesse du thé vert, mais aussi la finesse et l'élégance du Wuyi torréfié. Les fragrances sont très différentes, mais cette fraicheur et ce raffinement sont les points de rencontre de ces trois thés d'exception.
Un vieux thé qui garde le goût de la jeunesse, qui donne tant de qi, d'émotions, avec tant d'harmonie, voilà qui est presque miraculeux!
C'est tellement bon que je déroge à la règle que je m'étais fixée: comme il me reste un peu d'eau bouillante, je déguste une seconde infusion dans ce cadre naturel. (Et je finirai le reste chez moi).
Une fine pellicule blanche recouvre maintenant ma bouilloire. Mais l'esprit est au plus clair maintenant. Je sens mes yeux pétiller!
Le bonheur de ces coupes de thé est fugace comme une ombre, mais je crois que je l'ai gravé dans ma mémoire.
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