Friday, May 27, 2005

Le thé infuse la politique

Le référendum sur la TCE en France est l'occasion de vérifier que tout est politique. Même le thé. Autrefois, c'est au nom de la liberté qu'on a fait la fête du thé de Boston. Aujourd'hui, on nous ressert la sauce socialiste à travers le commerce équitable, solidaire et durable (blablabla).

A Taiwan, le premier penseur de l'indépendance fut un négociant de thé. Voilà ce qu'écrit Teaparker dans son livre: "La rue du thé de Taiwan":

Lee Chun Sheng , le père du thé de Taiwan

Comment Lee Chun Sheng, agent de John Dodd, est-il devenu le père du thé de Taiwan ?

En 1908, le journal taiwanais « Renew Daily », Nakaisi Gyuurou écrit dans l’autobiographie de Lee Chun Sheng : « Les Taiwanais n’avaient aucune idée comment fabriquer le thé à l’époque, et leur travail en fut perturbé. Par chance, je me trouvais au nord de Taiwan et trouvais la géologie des terres très propice à la culture du thé. En conséquence, j’ai encouragé les fermiers locaux à maintes reprises de planter du thé. Beaucoup de profits ont été générés, et cela explique que les fermiers se soient tous mis à planter du thé. »
Lee Chun Sheng a ainsi permis à la production de thé du nord de Taiwan de passer de 150,000 cartons à 200,000, et il a également favorisé l’arrivée de travailleurs de Xiamen pour aider au plantage du thé. Son plus grand succès fut de distribuer le thé à New York City sous le nom de « Taiwan Tea », ouvrant ainsi le marché international pour les thés de Taiwan. Cependant, d’autres documents historiques montrent que c’est Dodd qui vendit en premier le thé Taiwanais sous le nom de « Formosa Tea ». Qui ouvrit le marché nord-américain n’a pas encore été tranché.

En 2002, la mairie de Taipei publia « Les personnages de Taipei » : « En 1869, Lee Chun Sheng exporta 210,000 jin (600gr par jin) de thé sur deux voiliers avec le label « Taiwan Tea » vers New York. »

Fan Tseng Ping écrit dans « L’histoire du développement du thé à Taiwan » : « John Dodd fut la première personne à vendre du thé taiwanais aux Etats-Unis. En 1869, l’an Tongzhi de la dynastie Ching, John Dodd embarqua 2131 dan ( 60kg/dan) de thé oolong au label « Thé de Formose », sur deux voiliers à destination des Etats-Unis. »

Mais dans « L’histoire de l’association des marchands de thé », on lit : « En 1869, 213,100 jin d’oolong au label « Thé de Formose » furent expédié directement aux Etats-Unis, rendant le thé taiwanais célèbre mondialement. »

Ces deux citations soulèvent les questions suivantes :
1. Quelle fut la quantité totale de la première cargaison expédiée aux Etats-Unis ?
210,00 jin ? Jin veut-il dire « shih-jin » ou bien « tai-jin » ? Il y a 100 grammes de différence. 2131 dan ? Un dan pèse-t-il 50 ou 60 kg ? Cela doit être établi clairement.
2. Comment fut transportée la cargaison ?
Au 19ème siècle, les bateaux de transports étaient soit chinois à fond plat soit des clippers. Or comment est-il possible qu’un « voilier » ait pu transporter une marchandis aussi lourde que 213,100 shi-jin de thé ?

Ces quelques questions n’ont jamais remis en cause, toutefois, la place qu’occupe Lee Chun Sheng dans l’histoire du thé à Taiwan.

Lee Chun Sheng a commencé par le commerce du thé et a fait fortune en élargissant son champ d’activités. De plus, ce fut un écrivain prolifique. Il était un génie de l’histoire moderne de Taiwan, et pas que parmi les marchands, mais aussi parmi les intellectuels.

Lee Chun Sheng est né le 12 janvier 1838 à Xiamen, Fujian, Chine. Son père chrétien le fit baptiser en 1852 par un prêtre de l’église de la Congrégation britannique. C’est au contact des membres européens de cette église qu’il apprit l’anglais et le commerce. Il fit fortune en exportant le thé et en tant qu’agent vendeur de gasoil. Il acheta plusieurs propriétés à Da Dau Cheng et au centre de Taipei.

De nos jours, son mémorial, son église et sa résidence existent toujours à Da Dau Cheng.

Mémorial Lee Chun Sheng, 44, Guei De Street peut être atteint par la Min Sheng West Road. Ses murs rouges n’indiquent pas la relation entre leur propriétaire et le thé. Aujourd’hui, les trois batiments ... au No. 148-150, Di Hua Street, Sec. 1, furent l’ancienne résidence de Lee Chun Sheng et sont actuellement occupés par « Lien Hua Alimentation », « Ding Mau droguerie » et « Fu Tai Droguerie ». Un autre endroit rempli d’antiquités est au No. 42, Gan Zhou Street, bien que personne n’habite à l’intérieur. Mais le signe chinois « Lee » est gravé en rouge au-dessus du porche et il attire l’attention des passants.

Comment Lee Chun Sheng, simple agent, est-il devenu riche marchand, puis le premier penseur de Taiwan ?

En 1857, âgé de 20 ans, il commença à travailler pour la firme britannique Elles & Co à Xiamen, et continua à vendre du thé dans son magasin « Ouest Transport ». En 1866, Lee Chun Sheng accompagna John Dodd à Taiwan pour devenir son agent exclusif dans le commerce du thé. Il passa alors dix années à enseigner aux fermiers comment planter et produire du bon thé, et géra le commerce de thé de J. Dodd si bien que son « Thé du nord de Taiwan » devint populaire et le thé devint l’une des premières industries de Taiwan.

Après la faillite de Dodd & Co, Lee Chun Sheng devint l’agent exclusif de Boyd & Co. A ce moment, il fonda sa propre firme, en février 1886 ; Lee Chun Sheng s’associa à Lin Wei Yuan de Pan Chiao et ils construisirent des maisons et des magasins dans les rues de Chien Chang et Chun Chio à Da Dao Cheng, les louèrent à des firmes étrangères et accélérèrent ainsi le développement de la ville.

Dans la même année, Lee Chun Sheng fut chargé d’ériger une digue pour protéger Da Dao Cheng. Ce fut le début de la défense contre les inondations de la rivière Tam Shui. En 1921, le National Geographic Magazine fit un reportage montrant une vue de la digue de Da Dao Cheng.

Après 40 ans de carrière, Lee Chun Sheng était devenu un prodige du commerce. Ses connaissances linguistques l’avantageaient dans les milieux politiques et économiques.

Lin Man Chio ecrit dans « L’industrie Taiwanaise » : « En 1897, Lee Chun Sheng quitta Boyd & Co en fonda sa propre firme et s’aventura énegiquement dans le business du gasoil. En moins de cinq années, sa firme faisait déjà jeu égal avec Jardine Matheson & Co, la « reine des firmes étrangères », dans le nord de Taiwan. La fortune qu’il accumula n’était dépassée que par celle de la famille Lin à Ban Chiao, et il devint le second homme le plus riche de Taiwan. Lee Chun Sheng faisait toutes sortes de commerce, pas que le thé et le gasoil, mais aussi le camphre, le riz, le sucre, le textile et les produits occidentaux. A cette époque, il était appelé le « pionier de l’industrie taiwanaise ».

Dans ses temps libres, il écrivait des essais sur les événements de son époque. De 1847 à 1893, il écrivit 90 commentaires. En 1894, sa première collection « Zu Zin Nouvelle Collection » fut publiée. Il publia également un livre touristique. En tout, il écrivit douze livres.

Mais ses écrits n’étaient pas très répandus et peu de gens les connaissaient. Cela dura jusqu’en 1992, quand professeur Huang Jun Jieh du département d’histoire de l’université de Taiwan fit un discours ayant pour sujet « Conscience historique et avenir de Taiwan » devant le Rotary Club de Taipei Ouest. Les écrits et les pensées Lee Chun Sheng furent alors mentionnés. Lee Ming Huei de l’institut de litérature et de philophie chinoise de l’Academia Sinica écrivit la majeur partie du livre : « La pensée de Lee Chun Sheng et son époque » dont voilà un extrait :
« Professeur Huang dit dans son discours que Lee Chun Sheng fut le premier intellectuel de Taiwan. Dans son discours, il fit part de ses efforts de rassembler un grand nombre de ses écrits et de ses maigres résultats dans cette recherche. Par chance, Mr. Lee Chau Ran, petit-fils de Lee Chun Sheng, était membre du club et présent lors du discours. Il se présenta et fut d’accord pour prêter les nombreux écrits de son grand-père en sa possession. »

Wu Wen Shing, professeur d’histoire à l’univeristé Normale de Taiwan dit dans son livre « La philosphie de l’effort personnel de Ching Chi Lee Chun Sheng » :
« Lee proclamait que le prix du thé du nord de Taiwan était plus élevé parce qu’il avait enseigné aux fermiers comment produire le thé, et parce que la compétition entre eux les incitaient à s’améliorer. La quantité produite augmenta de quelques dan à 150,000 cartons en seulement 10 ans (1875). On estima qu’en 1876, la quantité était de 200,000 cartons et constituait la majeure partie des exportation du port de Tam Shui. Le thé taiwanais était décrit ainsi : des feuilles fraiches, riches en goût et aux parfums subtiles, invincible dans le monde entier.
L’amour de Lee Chun Sheng pour le thé taiwanais est clair. Il était très critique de la philosophie évolutioniste. En ce point il différait de ses contemporains qui croyaient fermement dans le progrès causé par l’évolution.

La vertu de la voie des ancêtres fut mentionnée « L’histoire générale de la province de Taiwan » de professeur Zhen Tien Tsong : « D’après ses écrits, nous pouvons appeler cela une idéologie de l’éthique, mais pas une philosphie. »

La religion de Lee Chun Sheng était le christianisme. L’église Lee Chun Sheng situé au No. 40 Ganzhou Street porte l’inscription « Août, Da Zheng 4ème année, construite par Lee Chun Sheng ». Sur une plaque sur le toit est écrit : « Brulé, mais pas détruit » en écho avec l’esprit chrétien et la pensée de Lee Chun Sheng.

Homme d’affaire, intellectuel éthique et religieux, il fut également un activiste sur la scène nationale. En 1895, la ville de Taipei était en désordre, et il se prononça pour laisser entrer l’armée japonaise dans la ville. En 1896, le gouverneur japonais lui conféra une médaille.

Matayosi Seisin fit la description suivante dans « Voyage dans le Taiwan d’aujourd’hui et d’autrefois » :
Lee Chun Sheng fit fortune par le commerce et fit également démonstration de son talent en politique. Durant la période japonaise, parce qu’il avait évité un bain de sang en laissant rentrer l’armée japonaise dans Taipei, il ne fut pas seulement décoré, mais reçut également certains privilèges et obtint certaines positions dans l’administration japonaise.

Il fut en charge d’évaluateur dans le comité de Compilation de données sur l’histoire de Taiwan en 1922 et reçut un titre de noblesse de l’empereur Hirohito en 1923. Le 5 octobre 1924, il mourut. Son parcours de la traite de thé à penseur de Taiwan le met dans la catégorie des grands Taiwanais. Mais de nos jours, il n’y a pas de plaque commémorant sa mémoire dans son Mémorial de la rue Guei De et Lee Chun Sheng a été submergé par le cours de l’histoire.

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