"Les montagnes à thé
Pour un français il n’est finalement pas si surprenant de découvrir que le thé, tout comme le vin, est soumis à la notion de terroir. Pour le thé du Yunnan, le terroir correspond à la montagne dont sont originaires les feuilles de thé. A la dégustation, on se rend facilement compte que le goût du thé varie significativement d’une montagne à l’autre. Des différences existent aussi pour une même montagne selon que les arbres poussent exposés au nord ou au sud ou selon la période de la cueillette (cueillette de printemps ou cueillette d’automne).

Il est à noter que, sur la plupart des montagnes, les plantations sont exploitées par des ethnies: Hani à Nannuo Shan, Yi à Yi Bang, Ji Nuo à You Le, Bulang à Bulang Shan.
Les montagnes à thé ne sont pas toujours faciles d’accès. Certaines sont assez éloignées des grands axes routiers. Nannuo Shan et Bulang Shan ne se trouvent qu’à quelques kilomètres de Menghai, mais comme sur la plupart des montagnes, l’accès aux villages et aux plantations se fait grâce à des pistes de terre difficilement praticables en saison des pluies. Il y a encore seulement quelques années, dans les villages les plus reculés de Yi Bang, faute de routes et de moyens de transport, les marchands venaient acheter les feuilles de thé à pieds, puis les emportaient dans des sacs, chargés sur des chevaux. Ces dernières années, un peu partout dans le Xishuangbanna, des projets gouvernementaux ont œuvré à améliorer l’accessibilité aux villages en créant de nombreuses nouvelles pistes et nouvelles routes. C’est un grand progrès pour les paysans qui peuvent désormais commercialiser plus facilement leurs feuilles de thé ainsi que les différents produits de leur agriculture.
Sur toutes les montagnes à thé, ont trouve aujourd’hui aussi bien des vieilles plantations que des nouvelles plantations. Aussi, il nous semble important d’essayer de définir ce que généralement on entend par ces termes.
Théiers sauvages ou théiers de vieilles plantations ?
Au cours des cinquante dernières années la forêt tropicale du Xishuangbanna a subi un défrichement intensif au profit de l’agriculture. Selon une étude d’une université de Kunming, entre 1965 et 1995 les surfaces de forêt ont diminuées de 50 à environ 27 % du territoire. Si dans les zones de forêts primaires toujours intactes on trouve encore des théiers sauvages, sur toutes les montagnes que nous avons visité (Nannuo Shan, Yi Wu, Yi Bang, Ge Deng, Mang Zhi, Man Zhuang, Bulang Shan) les théiers exploités, même s’ils sont parfois très vieux, ne sont pas considérés comme sauvages par les paysans. Un peu partout les villageois savent très bien que leurs vieux théiers ont été plantés à une époque très ancienne. Mais la mémoire orale n’a pas retenu ni quand, ni par qui. Pour certaine montagnes, ce genre d’information est parfois consigné dans les annales administratives chinoises. D’ailleurs les nouvelles normes gouvernementales imposent désormais sur les emballages l’appellation de « théiers de vieilles plantations ».
Les vieilles plantations

Il est fréquent de trouver des plantations très près des villages, c’est le cas à Bulang Shan où cette vieille plantation nous a fait penser à un jardin de thé.

On trouve parfois de vieux arbres jusque dans les villages au milieu des maisons.





Les vieux théiers
La région du Xishuangbanna s’enorgueillit de quelques vieux théiers centenaires. Certains sont devenus de vraies attractions touristiques comme celui de Pa Ta (Pinyin : Ba Da) qui aurait 1700 ans !
Ou encore celui de Nannuo Shan qui avec seulement un millier d’années fait la fierté de la famille qui le possède.




Dans le Xishuangbanna, nous n’avons malheureusement pas eu le temps d’aller dans la forêt primaire photographier des théiers sauvages poussant spontanément loin de toute action humaine. Mais pour vous donner une idée voici des photos prises au Laos.


Les nouvelles plantations intensives
Les plantations intensives sont très différents des vieilles plantations. Elles sont organisées de manière à permettre une exploitation plus intensive des théiers.

Il n’y a plus de couvert forestier comme c’est le cas autour des vieilles plantations. Si quelques rares arbres sont parfois conservés c’est pour fournir de l’ombre aux paysans et non pas aux théiers. Ici, les théiers sont plantés très serrés. Ils sont alignés en fonction du relief de manière à faciliter les déplacements des ouvriers agricoles. Ils sont taillés en plateau de cueillette afin de faciliter la récolte et permettre de meilleurs rendements. De manière générale, de telles plantations nécessitent l’emploi d’engrais et de pesticides.


Dans le Xishuangbanna, comme un peu de partout en Chine, les surfaces de terres cultivables sont limitées. Aussi les plantations de thé donnent souvent l’impression de disputer les terrains disponibles aux autres cultures.

Mais, malheureusement, malgré un renforcement du contrôle du gouvernement, de nos jours, la mise en culture de nouvelles plantations se fait parfois encore au détriment de la forêt tropicale."

Encore un grand merci à Philippe pour ce reportage et ses photos comme si on y était! Je crois que la différence entre les 3 catégories de puerh (sauvage, vieilles plantations et nouvelles plantations) saute aux yeux.
8 comments:
Très bel article superbement illustré.
Un grand merci pour ce très bel article!
que dire de plus que saccha et raphael ( qui soit dit en passant en met du temps pour reecrire son nouvel article ) . belles photos et sujet interessent : on s'y croirait presque , j'entend même les bruits de la foret :-D
An insightful look at tea with much relevance to tea's origins in the wild. Many thanks for the clear illustrations and details.
Superbe article qui fait rêver à des saveurs et des parfums exotiques. Je suis partagé entre des souvenirs de forêts tropicales où j'ai travaillé et des paysages viticoles. Espérons que les producteurs de Thé ne prendront pas les "travers" de nombreux vignerons qui privilégient le profit au plaisir de notre palais.
à propos des grands théiers dont les feuilles seraient difficiles à cueillir, quand est il de cette notion selon laquelle certains théiers seraient "récoltés" par des singes dressés à cet effet? légende rurale?
merci de partager ce mini reportage avec nous !
respect pour ces vieux arbres et j'espère qu'ils pourront pousser en paix et que l'appât du gain ne va pas forcer leur abattage...
tenez-nous au courant si un livre est publié.
Très belle initiative que ce reportage photo, ça fera d'autant plus de magnifiques images lors de nos dégustations !
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